Efface ton cœur corrompu et tes mensonges sales,
Et réécris
Cette illusion que tu ne peux accepter,
Et cette sensation d'exister que tu ne peux oublier.

Je me verse un autre verre, la main tremblant légèrement. Je n'y peux rien, c'est automatique, à peine est il à moitié vide que je me dois de le remplir. En réalité, je n'aime pas vraiment l'alcool, mais entre être et paraître, il y a sans doute déjà des kilomètres. Je jette un coup d'œil à la jeune fille assise à côté de moi, son regard semble me dire quelque chose comme : « Molo molo, on a dit qu'on rentrerait dans un état normal. » Dans notre groupe, nous sommes quatre. Moi, October l'américaine, José le toxico, et Willemina ma jumelle. Je sens sur ma nuque son regard critique, elle n'aime pas me voir dans cet état. A vrai dire, je la considère plus comme ma mère que comme ma sœur, plus mature que nous tous, elle sait se limiter, mot que nous autres ne connaissons pas. Agissant comme une conscience ou l'angelot que nous pouvons voir sur l'épaule des personnes de dessin animé, elle connait les dangers qu'on peut courir et est toujours la dernière à s'aventurer dans un mauvais jeu. Mais au final, elle reste jeune et je vois bien la lueur d'envie qui brille parfois dans ses yeux. Je soupire sans oser me retourner, elle va encore me faire la moral et les quelques verres que j'ai bu commençant à faire leur effet, je pourrais vite m'enflammer.

« Claes, limite toi s'te plais. J'ai pas envie de te porter sur mon dos pour le chemin du retour. »

Je n'écoute José que d'une oreille, faisant tanguer le liquide dans son verre. Sans plus de cérémonie je le porte à mes lèvres et le finit d'une traite. Celui ci ricane tout de même gentiment. Il n'est pas très porté sur la boisson et a bien d'autres moyens plus illégaux pour se détendre. Je vois October rejeter sa chevelure couleur soleil en arrière et adresser un clin d'œil à un jeune homme assis plus loin. Elle est douée pour ça et son physique ne lui donne que des avantages. Des formes généreuse, un sourire d'une blancheur immaculée, des jolies boucles blondes et des yeux vert émeraudes. Ses parents semblaient avoir, dès son plus jeune âge, comprit que son apparence les aideraient. A l'époque, leur compte en banque n'était pas dès plus rempli. Sans réellement se soucier de son avis de petite fille, ses géniteurs l'avaient inscrit dans une agence de mannequinat junior où elle posait, défilait, apparaissait sur les magasines de mode les plus branchés ainsi que sur les affiches publicitaires de parfum, chaussures, vêtements. On peut dire qu'à l'époque, la demoiselle était l'enfant reine du moment. Mais les gens se lassent facilement et ils l'ont jeté aux oubliettes. Parfois, il arrive que quand nous nous baladons, quelqu'un la pointe du doigt et chuchote à l'oreille d'une autre personne. Il arrive même que certains lui demande des autographes. Mais toutes gloires est éphémère, nous l'apprenons à nos dépends. Willemina, quant à elle, essaye encore et toujours de draguer José. Elle n'éprouve pas de sentiments pour lui, j'en suis presque certain. Mais comme à chaque fois, il l'envoie voir ailleurs, toujours avec classe, une phrase, un mot, un regard. Entre eux, c'est un jeu. Elle le chasse et il lui échappe. J'observe un instant, faute de ne savoir quoi faire, comment aujourd'hui ma sœurette s'est vêtue. Son style m'a toujours impressionné tant il débordait à la fois d'originalité et de touches personnelles, même la veste en cuire que toute les fillettes aimant le rock à minette portent paraissait si... Will ! Je m'attarde plus sur sa coiffure, l'idéalisme vestimentaire, selon son point de vue, ne repose presque que sur le visage. Ses wayfarer sur le nez, sa mèche lui cachant presque entièrement un œil : Elle a du style et elle le sait. Certains disent que, quoi qu'elle porte, tout lui irait à merveille, et je me range de leur côté. Je souris en voyant le tatouage qu'elle a fait faire il y a une semaine, le jour où elle s'est coupée les cheveux, à la va vite dans la salle de bain. Sa nuque est totalement dégagée, 'coupe à la garçonne' comme elle le dit si bien. Le peu de chevelure décolorée en platine qu'il lui reste est en pétard parsemée de mèche couleur criarde. Un coiffeur professionnel n'aurait pas mieux fait. Et dire que nos parents sont des gens simples, mangeant poisson le vendredi et allant à la messe le dimanche. Bree Van De Kamp ferait pâle figure à côté de notre mère. Puisque je suis sûr ma lancée, autant vous détaillez aussi Jo'. Ah, José. Je crois qu'enfin de compte, c'est la personne la plus simple et la plus difficile à imaginer pour quelqu'un qui ne l'a jamais rencontré. Premièrement, son véritable prénom est Gabriel, celui d'un ange mais il n'a rien qui puisse se comparer à un envoyé du Seigneur et s'est renommé José après la mort soudaine de ceux qui le mirent au monde. Le tragique accident laissant un gamin orphelin avait fait la une des journaux. Dans certains films, nous pouvons rencontrer le beau ténébreux musclé, avec sa barbe naissante, qui a le charme et la répartie sans oublier des yeux qui vous transperce, et bien... C'est lui. Un mélange de Tom Sturridge, Milo Ventimiglia, Gaspard Ulliel et Matt Dallas. Mais ne rêvez pas, vous n'avez aucune chance. Si quiconque essaye de l'approcher, Will sort les griffes. C'est bien simple, il n'a pas eu une relation stable avec une demoiselle depuis au moins deux ans et elle en est extrêmement fière. S'il savait que derrière son dos, elle nuit à sa réputation en clamant qu'il est gay, il serait vert. Mon regard se perd dans le vide et je vois du coin de l'œil une autre jeune fille s'approcher, elle parait légèrement plus jeune que nous quatre. Son nom est Prudence, il me semble. Je ne la connais que très vaguement, je crois il s'agit d'une voisine. J'ai du coucher avec elle, une fois.

« A qui tu parles ? Et qu'est ce que tu fais seul Claes ? »
« Seul ? Non, regarde, Will, October, José, ils sont là. »
« … Non. Ils ne sont plus là... S'il te plait, admet le. »

Je suis juste à la recherche de ce ciel que j'ai perdu
J'espère que tu comprends.
Ne me fais pas cette tête, comme si tu te sacrifiais

* * *


Comme en écrivant sur un bloc-notes,
Je veux tout révéler avec plus de sincérité
Qu'est-ce que j'essaie de fuir ?
Est-ce ce qu'on appelle "la réalité" ?

Ma sœur et moi sommes nés dans une famille sorcière mais avons été élevé presque comme des moldus. Voilà pourquoi la cigarette, le rock'n'roll et la drogue rythment nos vacances d'été. Nos voisins, October et José, entre autres, ne connaissent pas notre secret. Durant cet épisode que je viens de vous raconter, nous étions en cinquième année et avions seize ans. Ça faisait un an. Tout juste un an, que ma, non, notre vie, a basculé.

Les larmes ne mettent pas fin à un pêché
Il faut péniblement continuer à vivre avec
Dans ce labyrinthe de sentiments où la sortie n'est pas à porter de vue
Qui est-ce que j'attends ?

Je pleure, je plonge, je me noie. Je suis un mec et alors ? Est ce que ça veut dire qu'on doit toujours paraître fort ? Dehors, il pleut. La pluie peut parfois effacer les erreurs, les laver comme on lave les soupçon. Parfois seulement. Trois jours que je dors, trois jours que je ne me nourris plus. Enfermé dans ma déprime, enfermé dans ma chambre. Personne ne peut imaginer comment ça fait mal, et si les gens disent qu'ils compatissent, ce ne sont que mensonge, que peuvent ils y comprendre ? Et je cherche comme toujours mes écouteurs pour les enfoncer dans mes oreilles et me couper de cet univers, plonger dans le mien tête baissée, ce monde si rassurant des enfants, abandonner les vérités blessantes de grande personne et se laissait envahir par la musique, par les songes, par le mensonge. Je n'ai que quinze ans merde, laissez moi tranquille. Elle est là. Encore.

« Cla', tu ne manges pas ? »
« Plus tard, Will. »

Les gens dehors me croient fou. C'est faux. Ma mère m'a envoyé chez un de ces psychiatres moldu. J'ai peur qu'elle me jette un sort d'amnésie. Je ne veux pas, elle est là. Pourquoi ne la voient ils pas ? Bercé par la musique, ma sœur vient s'assoir sur mon lit.

« Il va bien falloir que tu m'oublie un jour, tu sais... »

J'augmente le volume de mon Ipod, pourquoi dit elle ça ? Elle est censée être comme je le souhaite. J'essaye de m'abandonner aux bras de Morphée, ce qui finit par arriver.

Tandis que de l'agacement grandis dans mon cœur,
Une sensation brûlante parcourt mon corps
En vérité j'attends quelque chose
De ce qu'on appelle "la réalité"

« Envy, je vais faire un tour, tu veux venir ? »

Je grommèle. Nous n'avons que quinze ans, elle conduit la moto de notre père et après ça, elle ose dire qu'elle est la plus sage d'entre nous. Il faut avouer que les deux roues, chez elle, sont une vraie passion. Elle ne peut en voir que pendant les vacances car le reste du temps, nous sommes à Poudlard. Et je dois encore admettre une chose, elle est fichtrement douée. N'entendant pas de réponse, elle claqua la porte et démarra la bête. Elle doit sans doute être en train de l'enfourcher et de partir à travers la ville pour arriver à la piste, prêt du super marché. Nous venons de nous disputer et elle semble déjà l'avoir oublié. Quoi que pendant nos temps de crise, la jolie m'appelle par mon deuxième prénom. Nos parents m'ont encore passé un savons. « Tu as vu tes notes aux BUSE, c'est impensable, prends exemple sur ta sœur.» Et bla bla bla. Elle, l'intelligente Serdaigle et moi le minable Gryffondor qui n'a, pour se rattraper, qu'une soit disant loyauté. Dans notre enfance, c'était toujours pareil. Au primaire je ramenais les D, elle récoltait les A. Nos grands parents l'ont toujours préféré. Alors, moi, pour la rendre jalouse, je comptais sur ma popularité. Les filles m'aimaient toutes et j'avais une bande dont j'étais le chef. Si je donnais un avis, les autres approuvaient. Si quelqu'un m'énervait, les enfants l'excluait. Mais je n'ai jamais pu faire subir ce sort à Will. C'est ma sœur. Alors quand les gamins pensaient me faire plaisir en l'insultant, ils n'avaient le droit, en échange, qu'à un coup de poing digne du CP que j'étais. Qu'on ne la critique pas, ma moitié. Je m'étira et attrapa une plume qui trainait sur son lit. Les professeurs nous avaient donné divers choses à faire pendant les vacances. Comme s'entrainer à certains sortilèges et rédiger quelques biographies de sorciers connus. Plongé dans ma description de la potion tue loup, je n'entendis pas son portable sonner une, deux, trois fois. C'est à la fin de la quatrième sonnerie que je décrocha inextrémisse, pour entendre la voix paniquée de mon père.

« C'est Willemina, elle a eu un accident. Viens à l'hôpital. »

Mon cœur rate un bond. C'était impossible. Elle savait manier sa moto comme une championne. J' attrape ma veste, la balance sur mon dos et me précipite en dehors de la maison sans prendre la peine de la refermer, en courant vite, j'y serai dans cinq minutes.

Je suis venu en courant désespérément, rapidement,
Les battements de mon coeur semblent vouloir exploser.
Ta voix fait de l'écho, elle crie.
On n'a pas de temps à perdre à rester là,
A vos marques, prêts, partez.

J'arrive rapidement devant le petit hôpital de la ville, l'unique d'ailleurs. J'entre en trombe et me précipite au guichet, le regard sans doute apeuré car l'expression de l'infirmière est tendre, comme pour me rassurer.

« Qu'est ce que vous avez fait à ma sœur ?! Où est elle ? »

La jeune femme ouvre et referme la bouche plusieurs fois sans comprendre, des patients, elle en voyait des centaines. Dernière moi, je sens une présence familière. Sans ni me rendre compte de qui il s'agit, un docteur m'ayant soigné une petite grippe ou peut être bien quelqu'un de la famille, qui sait, je suivis cette personne. Elle m'amena en face d'une salle, où sur un banc, attendait ma mère pleurant dans un mouchoir et mon père se tenant la tête entre les mains. Je me dirige vers le hublot de la salle. Will est allongée sur une table, des médecins s'agitent autours d'elle. Sa veste en cuire est ouverte et un des hommes sort deux appareils électriques. Vous savez, ceux des films, qui réussissent toujours à ramener les gens, à faire rebattre leur cœur. Je sursaute en même temps que les décharges, ils vont me la ramener n'est ce pas ? Soudain, un silence de mort règne, seul un interminable 'bip' résonne à mes oreilles. Le docteur baisse la tête.

« C'est finit. Je suis désolé ma jolie. » murmure ses lèvres.

Mon cœur court sous ce ciel,
Je n'arrive pas à cacher les plaintes de mes sentiments oisifs.
Je te rejoindrais sûrement dans peu de temps.
La soleil brille et éclaire cette route.
A vos marques, prêts, partez!
S'il te plait, fais-moi confiance.

Je me réveille en sursaut. Les cheveux ébouriffés, le souffle accéléré, ce souvenir me hante. Tous, ils m'ont tous abandonné. October s'est faite réengagé par une agence s'occupant des adolescentes en devenir, et est partie il y a un an. José n'avait que quatorze ans, comme nous tous à l'époque, ses parents étaient décédés il y avait peu alors et un autre membre de sa famille, sa tante il me semble, était venu le chercher pour l'emmener en France. Et maintenant, c'était à Will de partir. Je porte malheur n'est ce pas ? J'enlève les écouteurs qui crient leur musique et les balance à l'autre bout de la pièce.

« Claes, calme toi... »

La voix de ma jumelle m'apaise. Ça va faire un an que ma sœur vit pour moi, en moi. Mon ventre émet soudain un bruit indiquant que cette grève de la faim occasionnée ne lui plaisait pas. Je décide enfin à me lever, mes jambes semblent avoir du mal à soutenir mon poids, mais je réussis tant bien que mal à descendre les escaliers.

"Comment suis-je supposée ouvrir la prochaine porte ?"
J'y réfléchis.
L'histoire sans retour possible en arrière a commencée.
Réveille-toi,
Réveille-toi.

Ma mère se tient debout, en face de moi. Elle est de dos et ne peut donc pas me voir. Elle semble d'ailleurs trop occupée au téléphone pour se rendre compte de ma présence.

« Très bien, je vois. Vous dites donc qu'il s'est inventé une sorte d'ami imaginaire qui reprend le physique et la personnalité de sa sœur ? Est ce grave ? Mmh, oui, oui, je comprends. Pourriez vous le soigné ? C'est à lui de se libérer d'elle ? Vos paroles sont dures monsieur, il n'a que quinze ans. Mmh, tout à fait. Son accident ? C'est... Difficile à raconter, même pour moi. Vous comprenez, il est … Comment dire, dans une 'école' où il est actuellement en cinquième année, je pense qu'à la rentrée, il pourrait enfin se rendre compte de son absence. Ça ne sera pas trop brutal, n'est ce pas ? Bien, très bien. Au revoir et merci pour tout. »

Je veux crier fort "je vis pour réaliser mes rêves".
Tu peux m'entendre ?
Je ne peux continuer à rester trop prudent
Mais je n'ai plus nul par où retourner non plus
Je suis reconnaissant pour toute cette gentillesse
C'est pourquoi je veux devenir plus fort - je suis sur la voie -
Même cette peine nostalgique est la bienvenue.

« Ce que ma mère ignorait, c'était que toute ma cinquième année se passa comme pendant les grandes vacances. Je m'étais créé une intimité où personne ne pouvait pénétrer. Sourire triste ou larme de joie, les gens sont si compliqués. Je pensais aller bien, car elle était toujours là, mais au fond de moi, toute ma vie était chamboulée, ce que je ne savais avouer. »
« Je … Claes, pourquoi me racontes tu tout ça ? »

Je ne releva pas ses paroles, trop occupé à regarder ma sœur et mes amis se lever. Ils m'adressèrent un sourire presque reconnaissants et me firent un signe de la main. Je les regarde s'évaporer devant mes yeux, tandis que mon cœur se faisait plus léger, j'avais enfin accepter le départ d'October et José, ainsi que la mort de ma sœur. Dans un mois, je rentre en sixième année, celle ci sera bien différente des deux précédentes. Et dire que je menais une vie banale avant ma quatrième année... Prudence ne sait où se mettre, elle semble à la fois heureuse que l'inaccessible Osborne que toutes les jeunes filles idéalises se confit, mais aussi extrêmement mal à l'aise par cette sincérité.

« Efface, et réécris cette illusion que tu ne peux accepter, et cette sensation d'exister que tu ne peux oublier. Réincarne-toi, et réécris l'imagination dépourvue de sens. Mets-y tout ce que tu as, toute la force que tu possèdes. »
« Pardon ? »
« C'est une chanson. Oublies... Non, en fait, n'oublies pas, garde tout ça en toi, ne modifie aucun instant ce que qu'il s'est passé, jamais. Et merci de m'avoir écouté. »

Je me lève, léger et libre. Je vais devoir me débrouiller seul maintenant.

La vie est encore trop longue pour se débarrasser de toutes ces pensées
Je veux pouvoir tout recommencer afin de finir ce qui a été abandonné
Devrions-nous y retourner ?